Supertramp “Breakfast In America” [1979]

Quand Supertramp sort ce sixième album en 1979 il est alors à son apogée commerciale et critique.

Vendu à plus de trente millions d’exemplaires dans le monde l’année de sa sortie, cet album est en outre gorgé de quelques uns des plus grands standards du groupe. C’est ce que nous allons voir. Ou plutôt entendre.

Le Superclochard

Supertramp est un groupe de rock progressif britannique qui a connu la plus grande partie de son succès dans les années 70 et 80. Son nom de scène est un jeu de mot qui signifie Superclochard. Tout un programme. Ses productions sont marquées par des thèmes alliant humour taquin teinté parfois de mélancolie et invitant à la réflexion sur fond de mélodies évidentes (“School“, “Dreamer“, “Give A Little Bit“, “Downstream“, “It’s Raining Again“). Cela rappelle d’autres grands noms de la pop music…

Il a souvent été dit (dont par moi-même) que si les Beatles ne s’étaient pas séparés en 1970, il est fort probable que leur musique aurait été très proche du son de Supertramp. A l’inverse un titre comme “Dreamer” n’aurait pas du tout fait tâche dans la discographie de Queen par exemple.

Deux têtes pensantes

De sa création en 1969 à 1983, les deux têtes pensantes du groupe seront Rick Davies et Roger Hodgson. Un peu à la manière de John Lennon et Paul Mc Cartney, ces deux-là se répartiront l’écriture et la composition de l’essentiel du catalogue.

Toutes les musiques étant estampillées sous la marque du groupe, cela entraînera des querelles qui durent encore de nos jours depuis le départ d’Hodgson en 1983. Celui-ci mettra toujours un point d’honneur à ne reprendre que les titres de sa main dans les concerts de sa carrière solo. Le reste du groupe continuera en revanche à interpréter en live tous les titres du répertoire superclochardien, tubes de Hodgson en tête bien évidemment.

Truffé de mélodies évidentes

Et côté contenu cela donne quoi ? Explorant toujours ce savant mélange de musique à la fois dense et mélodique, Supertramp nous offre une collection de chansons qui ont marqué plusieurs générations de musiciens et de mélomanes.

Les entraînants “Breakfast In America” (compo d’Hodgson) et “Goodbye Stranger” (compo de Davies) en sont les meilleures illustrations. On y trouve aussi une ballade poignante (“Lord Is It Mine?“), un rock puissant de Davies (“Just Another Nervous Wreck“), un final grandiloquant qui clôt en beauté cet album majeur des années 70 (“Child Of Vision“) et surtout l’euphorique “Take The Long Way Home” (encore signé par le génial Hodgson).

Et puis enfin il y a ce titre qui mettra tout le monde d’accord : “The Logical Song“. A l’heure où Supertramp divisait les amateurs et les jamais-au-grand-jamais, cela plu alors à l’époque à toutes les audiences et notamment à la presse spécialisée qui adorait le côté rock progressif du groupe mais dévalorisait son aspect commercial. C’était courant à l’époque et c’est encore valable de nos jours. Lorsqu’un artiste se met à vendre beaucoup, il perd immédiatement en crédibilité et donc en succès critique.

Ce fameux album à la pochette si particulière de nos jours (on y voit les anciennes tours jumelles du World Trade Center de New York sous forme de boîtes en carton pour denrées alimentaires) est par ailleurs le disque de musique étrangère le plus vendu en France depuis sa sortie (environ 3.5 millions d’exemplaires sans compter les innombrables versions pirates et exemplaires dupliqués).

Pour finir je vous recommande chaudement l’album live de la tournée Breakfast… enregistré à Paris en 1980 et nommé sobrement Paris. Il s’agit d’un véritable best of live des années 70 du groupe et qui ne se concentre pas que sur l’album qui nous a intéressé ici le temps d’un article.

Maintenant vous pouvez y aller. Take The Long Way Home.

Tracklist :
01 Gone Hollywood (5:20)
02 The Logical Song (4:11)
03 Goodbye Stranger (5:50)
04 Breakfast in America (2:38)
05 Oh Darling (3:49)
06 Take the Long Way Home (5:08)
07 Lord Is It Mine (4:09)
08 Just Another Nervous Wreck (4:26)
09 Casual Conversations (2:58)
10 Child of Vision (7:25)

→ Lien Wikipédia sur Supertramp
https://fr.wikipedia.org/wiki/Supertramp

→ Site officiel du groupe
http://www.supertramp.com/

→ Site officiel de Roger Hodgson
http://www.rogerhodgson.com/index.html

Deux Moi [2019]

Une comédie dramatique d’aujourd’hui signée Cédric Klapisch qui fait du bien.

Une romance mitoyenne

Le pitch de départ de cette comédie douce-amère est le suivant : deux célibataires vivants chacun et chacune dans leurs appartements respectifs situés dans deux immeubles mitoyens se croisent mais ne se voient jamais. Les deux trentenaires isolés sont en proie à des états passagers de déprime latente et de résignation.

Noyés dans un quotidien assez terne du travail et dans la routine du métro-boulot-dodo (l’un n’arrive plus à trouver le sommeil, l’autre dort trop), nos deux héros vont alors tenter de remonter la pente de la dépression chronique qui les guette.

Quelques petits faits anodins vont rapidement leur révéler cet état de fait et les incitera à pousser les portes deux psychologues (joués par une délicieusement drôle Camille Cotin et un François Berléand qui parle peu mais qui vise toujours juste).

François Civil (“Le Chant du Loup“, “Mon Inconnue“) et Ana Girardot (“Ce qui nous lie“) forment un duo efficace et ce même s’ils ne partagent pas de scènes conventionnelles où s’échangent des répliques. Mais ils apparaissent néanmoins ensemble dans de nombreux plans (notamment lorsqu’on les voit contempler mélancoliquement le lointain sur leurs balcons respectifs).

Enfin quelques petits rôles discrets mais notables sont irrésistiblement comiques et vont même involontairement avancer l’intrigue (Zinedine Zoualem en pharmacien un peu coincé et surtout Simon Abkarian en épicier drolatique). A noter aussi une apparition désopilante de Pierre Niney (ancien comparse de Civil dans la série Casting(s) et dans Five qui tente tant bien que mal de raviver les souvenirs de collège-lycée de son pote).

2.0 quand tu nous tiens

Chronique amusante des travers des réseaux sociaux, on en sait un peu plus en ressortant sur comment trouver l’âme sœur grâce à la technologie. Pour le meilleur (retrouver un ancien camarade de classe pour Rémi) comme pour le pire (enchaîner les relations disparates pour Mélanie).

Dans ces deux cas extrêmes, le film fait beaucoup rire et parfois même avec une touche de d’humour caustique. Le monde du travail en prend également pour son grade (la pression que subit Mélanie pour la préparation d’une présentation collective, le côté déshumanisant d’une activité terriblement routinière pour lui).

Cette comédie réserve aussi ces rares mais nécessaires instants à tonalité plus grave comme Klapisch nous y a souvent habitués dans ses précédents films (« Le Péril Jeune », « Un Air de Famille », « Paris »). Rien de larmoyant, juste des scènes qui donnent un peu plus de profondeur à la légèreté de l’ensemble.

Et puis comme le dit de manière totalement désabusée la psy de Mélanie « les réseaux sociaux ont tué les relations sociales ». Mais cela n’a pour l’instant encore trop empêché les gens de danser lorsque l’envie leur prend. Encore une méthode parmi d’autres qui fonctionne toujours pour faire des rencontres.

E D I T H D E N A N T E S

→ Lien Wikipédia sur le film
https://fr.wikipedia.org/wiki/Deux_moi

Africanism [2000]

Un remarquable projet de la French Touch aujourd’hui un peu passé à la trappe mais qu’il faut d’urgence redécouvrir !

Un son tribal

Africanism est marqué par les sonorités du plus vieux continent du monde. Inutile de vous préciser lequel le spoil est déjà assez évident rien qu’avec son titre.

Ce projet s’inscrit dans le cadre de la réunion pour l’occasion d’une bande de potes tous aussi talentueux que gentiment débridés. Ce collectif appelé Africanism All Stars comptait alors dans ses rangs quelques-uns des meilleurs éléments du courant musical que l’on appelait la French Touch.

Cette dernière est apparue dans les années 90 et se caractérisait par les productions d’artistes notables dans les étendards étaient Laurent Garnier (Shot In The Dark), Daft Punk (Homework), Air (Moon Safari) et Cassius (1999).

Une sono internationale

On trouve “Bisou Sucré” et “Kazet“, deux titres de Bob Sinclar alors dans sa meilleure partie de carrière (Champs Elysées sorti l’année d’avant est son meilleur disque). “Block Party” et “Tourment d’Amour” sont des petites perles de DJ Gregory alias Grégory Darsa.

Il y a aussi la version complétement reconstruite d’un titre de Cerrone (influence majeure de la French Touch) intitulée “Love Is The Answer” et finement remixée ici par Liquid People.

Ces derniers sont aussi responsables de “The Dragon“, redoutable morceau où les percussions sont largement mises à l’honneur. Sur “Trompeta Alegre” l’instrument en question se lance dans un remarquable solo qui fait le pont entre Afrique et Amérique latine. Ce dernier titre quant à lui est l’œuvre de DJ Rafael “DJ Lego” Rodriguez (oui c’est un nom à rallonge mais le talent lui est bien certain).

Seconde partie qui monte crescendo

Une ambiance un peu plus psyché (limite mystique) se dégage particulièrement dans la seconde moitié du disque avec des titres comme “Call It Jungle Jazz” ou “Zulu’s” qui clôt le mix.

Et puis il y a le génialissime “Edony (Clap Your Hands)” de Martin Solveig qui obtenait là son premier grand succès international et ce bien avant les “C’est La Vie“, “Hello” et autres “Intoxicated” (on est en 2000 on le rappelle). “Edony “qui est à l’origine un titre faussement acoustique est donc ici présent sous sa forme remix club. Succès hexagonal et pas mal vendu à l’exportation, c’est ce titre qui a fait le bonheur de très nombreux DJ qui ont pu faire danser autant d’innombrables foules par la suite.  

Un mix diabolique

Pour finir il faut tirer le chapeau à Sinclar d’avoir su parfaitement mettre en valeur un choix de musiques cohérentes de toute cette bande de joyeux drilles dans un mix d’un peu plus d’une heure et dix minutes qui renverse tout sur son passage.

Finement mixés, la quinzaine de titres qui composent ce set forme une sorte de paysage sonore des plus communicatifs et des plus relevés. Parfait pour vos soirées endiablées avec une foule de personnes plus ou moins adeptes de clubbing ou pour un long trajet seul.e sur autoroute.

Trois suites viendront (Africanism Volume 2, 3 & 4). Malgré une qualité correcte elles seront un peu moins inspirées car l’authentique French Touch se diluera dans les années 2000 pour évoluer vers d’autres horizons musicaux, quitte à perdre radicalement l’essence même de ce qui a longtemps fait son charme. Mais avec ce premier volume d’Africanism, vous en aurez largement pour vos frais !

Comme dans “Edony“, vous pouvez applaudir avec vos mains.

→ Lien Wikipédia (en anglais)
https://en.wikipedia.org/wiki/Africanism_All_Stars

“Yesterday” [2019]

Une comédie réjouissante à souhait et dont l’idée de base est aussi simple que cocasse : et si les Beatles n’avaient jamais existés ?

Une histoire singulière

Cinéaste percutant dès ses débuts (Petits Meurtres entre Amis et surtout Trainspotting), un peu moins inspiré ensuite (La Plage, Sunshine) jusqu’à la consécration internationale (Slumdog Millionnaire), le réalisateur britannique Danny Boyle nous offre avec Yesterday une comédie romantique sur fond d’uchronie où les quatre de Liverpool sont désormais inconnus des pages Wikipédia.

Sans pour autant vous ôter le plaisir de regarder Yesterday, il faut savoir qu’il n’est pas impossible même si cela n’a pas été formellement prouvé que cette histoire ait été plagiée sur une bande dessinée française et un manga japonais datant tous les deux d’une dizaine d’années avant la genèse de ce film.

Mais bon. Autant essayer de prouver que le vrai Paul Mc Cartney est mort en 1967 et que celui que nous connaissons actuellement n’est qu’un sosie (des conférenciers un brin complotistes mais réellement sincères dans leur démarche tournent de par le monde depuis des décennies pour défendre cette théorie…)

Côté rythme on ne s’ennuie pas un instant. Tout comme son personnage principal Jack Malik (Himesh Patel), on est porté de bout en bout par cette histoire qui nous dépasse tant les choses vont vite.

Se rendant compte suite à un accident qu’il est désormais la seule personne au monde à se souvenir de la musique des Beatles, Jack va alors se faire connaître très rapidement en interprétant une bonne partie du répertoire qu’il connaît bien en tant que musicien qui jusque-là n’arrivait pas à percer.

Pas de fausse note

Danny Boyle livre ici un bon film réalisé sans fausse note car il reprend la musique des Beatles non pour l’empailler mais plutôt pour la faire revivre de plus belle. A tel point que l’on danse plus d’une fois sur son siège ce qui est jouissif et plutôt bon signe. Pour ce qui est des titres plus mélodiques comme des ballades à la Let It Be ou The Long And Winding Road c’est en revanche un peu moins émouvant qu’on aurait pu croire. Mais cela n’enlève rien à la force de ces splendides titres ni au charme du long métrage.

Le film ne sombre pas non plus dans les méandres de la comédie romantique conventionnelle. Le duo que le personnage de Malik fait avec sa meilleure copine (interprétée par une Lily James tour à tout mutine et sensible) fonctionne à plein et leur complicité à l’écran est réciproque. Cela forme une seconde histoire jamais larmoyante et qui reste très crédible dans son déroulement narratif (et que je ne vous spoilerai pas ici).

A noter entre autres savoureux gags toujours liés à cette uchronie la participation d’Ed Sheeran dans son propre rôle. Il a du bien s’amuser lors de cette expérience. Ce dernier se moque en effet gentiment de lui-même, reconnaissant entre deux crises de jalousie naissante qu’il n’est pas au niveau du talent exceptionnel de Jack Malik. Et qu’il ne sera désormais juste utile que pour faire ses premières parties !

La bande son

En plus de la musique, de nombreuses références à l’univers des Beatles sont présentes et parfois sous des angles qui sont plus que des clins d’oeil : la ballade dans Liverpool en est un des exemples les plus représentatifs et ravira les fans hardcores notamment.

L’apparition touchante d’un John Lennon vivant en solitaire au bord de la mer (joué par un Robert Carlyle méconnaissable) est peut être d’ailleurs un des rares moments où le film ralentit pour proposer au héros et au spectateur un temps de réflexion non négligeable.

Une bande originale réinterprétée

Le film bénéficie également d’une excellente bande son qui reprend forcément les titres les plus emblématiques du catalogue du groupe et qui sont trop nombreux à vous narrer ici. Et on trouve en plus de ces incontournables classiques quelques titres moins connus qui donnent à l’ensemble un aspect moins best of (I Saw Her Standing There, Carry That Weight, In My Life).

Tous les titres sont interprétés par l’acteur Himesh Patel qui livre ici des performances très correctes qui raviront à la fois les fans et les néophytes. Eh oui ça existe aussi. Je sais que cela parait étonnant de dire cela mais le temps passant, les goûts changent aussi et même si elle incroyablement universelle et populaire, la musique des Beatles peut commencer à n’être plus perçue comme une évidence pour les plus jeunes générations.

Gageons que ce film pourra lever les éventuels doutes des personnes qui ne sont pas familières de cette musique qui est et restera désormais du classique au plus pur sens du terme. Au même titre que Mozart comme dirait Sheeran.

E D I T H D E N A N T E S

→ Article sur le potentiel plagiat (afin que vous puissiez vous faire vous-même votre propre idée) :
https://www.lesinrocks.com/2019/07/05/cinema/actualite-cinema/yesterday-le-film-sur-les-beatles-a-t-il-plagie-son-concept/

→ Lien Wikipédia sur le film
https://fr.wikipedia.org/wiki/Yesterday_(film,_2019)

La Margarita

J’ai personnellement découvert ce super breuvage lors de soirées étudiantes post baccalauréat. Et à cette époque le bar où on consommait les margaritas avait pour spécialité de les servir non pas au verre mais au pichet ! Depuis tout ce temps nul désamour n’est venu troubler notre relation.

Sacré Margaret

Comme souvent beaucoup de variantes tournent autour de l’origine de ce cocktail. La plus courante et la plus vraisemblable est celle de Margaret Sames, une Américaine qui aurait créée dans les années 40 la recette telle qu’on la connait aujourd’hui.

Elle avait pour habitude de recevoir régulièrement des convives chez elle et aimait particulièrement la Téquila et la liqueur d’orange. Cela explique bien des choses car il s’agit du mélange des deux alcools de base qui composent la Margarita.

La recette en elle-même

Comme on vient de le voir la Margarita se compose à partir de Tequila : prenez un shaker et mettez-en à hauteur de 4 à 6 cl. Soit la moitié des ingrédients du verre. On rajoute ensuite de la liqueur d’orange à raison d’un volume de 3 à 4 cl selon la taille souhaitée du verre. Du Cointreau ou du Triple Sec c’est parfait. Enfin on termine avec du jus de citron lime à hauteur de 2cl.

Une variante consiste à remplacer le citron vert par du citron jaune. On peut aussi y rajouter un trait de sirop de sucre de canne pour adoucir le mélange si votre palais le trouve un brin trop amer. La présence d’agrumes tels que la liqueur d’orange et du citron en explique la cause.

Les différentes façons de servir

Si vous souhaitez à la fois un apport esthétique certain et une expérience gustative grandement améliorée, vous pouvez alors rajouter du sel sur le bord de votre verre. Pour cela il faut mettre délicatement du citron sur ses rebords puis les tremper dans du sel disposé dans un soucoupe prévue à cet effet lors de l’élaboration du verre.

Enfin il existe deux écoles pour servir la Margarita : vous pouvez conserver les glaçons dans le shaker en filtrant le mélange à travers la passoire. On appelle au passage cela une Margarita givrée ou “frozen“. Ou bien vous pouvez aussi verser le breuvage avec ses glaçons du shaker. Personnellement j’aime beaucoup conservé les glaçons dans le shaker et verser le contenu sur sur de la glace pilée.

Pour conclure il n’est pas inutile de préciser qu’il faut consommer cela avec modération. Au bout de trois verres cela peut vous jouer des tours.

Bonne dégustation ! Et avec modération !

→ Lien Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/Margarita_(cocktail)

→ Un site de cocktails bien ficelé
https://www.1001cocktails.com/

L’Entrecôte [Nantes]

Voilà bien quelque chose de rassurant. Et ce depuis 1959 ! Bon alors vous me direz que je n’étais pas encore de ce monde cette année-là. De mémoire je n’ai en effet mis le pied pour la première fois dans ce restaurant quand j’avais dix sept ans en 1999 soit trente ans après ses débuts (et accessoirement il y a déjà vingt ans ça aussi ça ne rajeunit pas).

A lire avant de consommer

Il est important de préciser que l’Entrecôte n’est pas une expérience exclusivement réservée à cette belle ville de Nantes. Il s’agit en effet d’une chaîne de restaurants dont le concept est rigoureusement identique dans les villes suivantes : Toulouse, Bordeaux, Montpellier et Lyon. Ce concept qui est toujours resté une affaire de famille existait déjà à Paris depuis 1959. Il s’agit d’un restaurant (unique celui-ci) situé dans le 17ème arrondissement dans l’Ouest parisien et connu sous le nom Le Relais de Venise – Son Entrecôte. Le concept a quant à lui été introduit en province à Toulouse en 1962. Celui de Nantes a été ouvert en 1980.

Comment vous décrire l’Entrecôte sans vous faire saliver ? C’est facile car avant de vous décrire ce qu’on y trouve et pourquoi c’est une bonne adresse, il faut vous préciser quelques informations notables si naguère vous souhaitez pousser les portes de cette institution.

Une sauce qui prend toujours

En premier lieu il s’agit ici de gastronomie traditionnelle typiquement française : c’est un menu unique composé d’une salade d’accueil légère suivi d’un plat à base de faux filet de bœuf et de frites maison à volonté, le tout servi avec une sauce dont la recette est restée longtemps aussi secrète que celle de la formule du Coca Cola ou encore celle de la sauce que l’on trouve dans les Big Mac de Mc Donald’s.

Cela me fait toujours penser que cette autre chaîne de restauration deviendra infiniment meilleure le jour où on pourra y boire du vin rouge avec son menu Best Of… L’accord mets et vins c’est en effet très important pour relever le goût de ce que l’on mange. Surtout au resto…

Bref vous l’aurez compris : vous avez plutôt intérêt à aimer la viande et surtout le vache patates. Si vous êtes végétarien.ne ou végan il est évident que cela fait de vous ce que l’on appelle en sciences économiques des non-consommateurs absolus. Donc vous risquez de vous y ennuyer. Mais pas forcément si vous aimez quand même la salade, les frites… et rire un bon coup !

La volonté de passer un bon moment

Deuxième point important : si vous avez la volonté de passer un bon moment en rigolant beaucoup et/ou en refaisant le monde alors vous serez servi.e ! Il ne faut pas sous-estimer ce genre de petits détails. Bien au contraire. En effet il faut savoir qu’une des clés du succès de l’Entrecôte depuis ses origines parisiennes est ce côté très convivial pour les gens qui y viennent. On s’y sent bien, on parle fort dans ce brouhaha permanent et cela joue sur les conversions entre personnes à table. Cela donne aux lieux un aspect plus proche d’une cantine généreuse pour bons vivants qu’un endroit cosy (mais froid) pour amoureux transis voulant être au calme.

Certes vous pouvez aussi y aller avec votre partenaire, concubin.e, mari, femme, etc. Mais vous avez plutôt intérêt à être à l’aise au milieu des autres clients de tous horizons qui seront tout autour de vous. Cela représente une source de bruit intempestive si vous pensiez y trouver uniquement calme et tranquillité. Les discussions enflammées, les rires communicatifs et parfois même une bonne entente qui se crée spontanément entre tables proches sont une des caractéristiques notables de l’endroit.

On ne peut pas réserver

Autre truc important à savoir et pas des moindres : le restaurant est toujours plein ! Et il n’est pas possible de réserver. Et là il y a toujours deux écoles : celles et ceux qui aiment manger tôt (ou rapidement) et qui viennent au premier service. Et les autres comme moi notamment qui préfèrent prendre leur temps.

Après c’est mon point de vue : hormis se pas savoir prendre son temps ou être pressé.e, il n’y rien de pire à mes yeux que d’engloutir son repas au lance pierre parce que le personnel vous sert vite et vous fait comprendre en filigrane qu’un second service arrive derrière.

Point faible si vous optez pour cette seconde option : on galère un peu plus pour avoir une table et on peut attendre un certain temps en faisant la queue en dehors du restaurant. Point fort : lorsque vous arrivez pour le second service on ne vous presse bien moins et vous aurez ainsi tout le loisir de prendre votre temps.

Ne surtout pas se presser

Enfin une dernière astuce aussi utile que terriblement subtile : votre plat principal est toujours accompagné d’un chauffe-plat sur lequel repose une seconde portion de viande marinant dans la célèbre sauce. Les différentes cuissons qui ont été retenues lors de votre commande seront toujours indiquées par le personnel dans le chauffe-plat. Si vous videz trop rapidement ce dernier, vous ne pourrez plus vous faire resservir en frites… Si vous êtes plusieurs et que vous êtes entouré.e de morfales, veillez à laisser quelques bouts de votre viande personnelle finement prédécoupée dans la sauce du chauffe-plat…

Après c’est comme partout : ne confondez pas gourmandise et gloutonnerie pour ce qui est de reprendre des frites à volonté. Mon record est de quatre fois ce qui est déjà fort honorable. Mais même avec un appétit solide il ne me serait pas venu à l’idée de me faire servir six, huit ou dix fois. Bah oui car ça fait morfale. Et donc c’est irrespectueux.

Pour conclure un dernier petit bonus rien que pour vous : voici la recette de la fameuse sauce qui a fait la réputation de l’Entrecôte : foie de volaille, thym frais, fleur de thym, crème fleurette, moutarde blanche, beurre, sel et poivre.

Et bon appétit bien sûr.

Adresse : 2 rue du Couëdic 44000 NANTES

→ Site officiel des restaurants L’Entrecôte
https://www.entrecote.fr/

→ La recette de la sauce (source Le Petit Fûté) :
https://www.petitfute.com/v17231-17292-paris-75017/c1165-restaurants/c4-cuisine-francaise/1529779-le-relais-de-venise.html

Michael Jackson “Off The Wall” [1979]

Premier vrai album solo du Michael Jackson adulte (il avait vingt ans lors de l’écriture et l’enregistrement du disque), Off The Wall est une perle. Il précède de trois ans l’autre sommet Thriller qui battra tous les records de vente et qui reste encore aujourd’hui inégalé.

Deux chefs d’oeuvres

Ces deux albums sont considérés à juste titre comme les deux joyaux de la discographie du Roi de la Pop. Mais le second a eu tendance avec les années à éclipser le premier. Off The Wal a eu en effet un succès moindre : 3 singles radio contre 7 et une seule récompense prestigieuse contre 8 (un Grammy Award pour le meilleur son). Mais il n’en pas moins intéressant pour autant.

Epaulé par Quincy Jones à la production avec qui il ouvre une trilogie d’albums légendaires qui se clôturera en 1987 avec Bad, Off The Wall est bien plus qu’une simple répétition avant le carton de son illustre successeur. L’album possède des qualités remarquables à tous niveaux (écriture, composition, arrangements et personnel présent).

Merci Quincy, Merci Rod

Parmi ce dernier on trouve pêle-mêle Quincy Jones à la baguette bien entendu mais aussi les Brothers Johnson, bassiste et guitariste sur la majorité des morceaux, Paul Mc Cartney qui compose un titre (“Girlfriend“) et surtout Rod Temperton qui lui en compose trois (“Rock With You“, le morceau titre et “Burn This Disco Out“). Pour info le même Temperton est un compositeur hors pair qui (entre autres standards internationaux ) sera déjà responsable l’année suivante du Give Me The Night de George Benson. Il écrira un autre petit titre de Jackson intitulé… “Thriller“.

L’album s’ouvre par le classique “Don’t Stop ‘til You Get Enough” (compo de Jackson) standard de funk brillamment arrangé par la patte de Quincy Jones qui met en valeur la voix de Michael sur fond d’arrangements de cordes millimétrés. Le disque est ensuite traversé de titres rythmiques encore plus rapides (“Workin’ Day and Night” et “Get On The Floor” sont des musts) ou de ballades sirupeuses telles que la délicieuse “Girlfriend“, le poignant “She’s Out Of My Life” et “I Can’t Help It” de Stevie Wonder.

Rock With You

Et puis il y a ce qui est probablement le meilleur titre du Jackson de la grande époque de la fin des années 70 : “Rock With You“. Je vous mets à la fin de cet article un lien vers une vidéo youTube d’une version longue de ce titre. Cette version avec une intro rallongée touche au divin. N’hésitez pas à m’en faire un retour dans vos commentaires.

A l’image de ce titre, on trouve sur Off The Wall tout ce qui fait le charme de Jackson comme les fans de base ou les simples amateurs l’ont toujours apprécié : il est tout jeune, sa voix est sensuelle, sa musique géniale. Il n’est pas encore trop malmené par l’argent qui coulera à flots après et surtout par les sombres affaires qui défrayeront la chronique dans les années à venir…

En dépit des énièmes rebondissements et dossiers qui ressortent régulièrement dans l’actualité et ce plus de dix ans après sa disparition précoce, on ne peut nier à cet artiste exceptionnel au talent indéniable la qualité d’Off The Wall qui restera une de ses toutes meilleures œuvres.

La suite sera différente

Par la suite la carrière de Jackson sera jalonnée de productions un peu moins inspirées (la redondance de certains titres de Dangerous) et surtout de projets plus anecdotiques comme Invincible par exemple. A nuancer néanmoins : avec les années l’album connait un regain d’intérêt de la part des fans et des professionnels du métier.

Pour finir il est grand temps pour vous de redécouvrir Off The Wall si vous pensez que Jackson n’avait commencé à cartonner qu’avec des “Billie Jean” ou des “Beat It“. Pour ne pas vous retrouver un jour au pied du mur tout simplement.

→ Lien Wikipédia sur Michael Jackson
https://fr.wikipedia.org/wiki/Michael_Jackson

→ Site officiel
https://www.michaeljackson.com/fr/

→ Vidéo youTube « Rock With You » [The Reflex Revision]
https://www.youtube.com/watch?v=BZxA6fHnnpU

“Piège de Cristal” [1988]

Premier volet de la série des films d’action à succès Die Hard et datant maintenant de trente ans, Pièce de Cristal n’en reste pas moins un pur plaisir jubilatoire lors de son visionnage.

Une masterclass de John Mc Tiernan

J’ai eu l’occasion de revoir ce film il y a peu et cela m’a remémoré une expérience vécue il y a quelques années de cela. C’était au festival Summer Camp de Nantes en 2016 : le réalisateur John Mc Tiernan avait été invité à l’occasion d’une masterclass où il faisait une présentation de son film dans le cadre de sa projection le soir même.

Cela m’avait permis de le voir sous un autre jour grâce à cette séquence. Et de vous narrer cela aujourd’hui dans ce petit papier que je ferai comme d’habitude quand j’écris un article : pas trop long et si possible percutant à point. Comme l’est Piège de Cristal.

Un film d’action qui prend le temps

Ce film a une particularité qui est devenue rare voire inexistante dans le cinéma d’action actuel : c’est son rythme. Ce dernier est en effet particulièrement bien dosé, l’intrigue ne se mettant en place que tout doucement et le déroulement du premier tiers est assez lent. Mais pas long. Nuance !

Avant que des films des années 90 comme Bad Boys ou The Rock de Michael Bay viennent définitivement mettre le film d’action hollywoodien typique sur des rythmes ultra rapides, ce premier volet de Die Hard est un sommet du genre car bien moins hystérique que les productions actuelles. Et surtout bien plus second degré dans un grand nombre de séquences qui mises bout à bout ont contribué à en faire un film culte.

On y trouve ce savant mélange d’action et d’humour mordant, cocktail détonnant servi par un Bruce Willis dont la carrière prendra véritablement son envol à partir de ce film. Auparavant habitué à des rôles de comédie où il n’était pas à son mieux (la série Clair de Lune), il trouve avec le rôle de John Mc Clane un personnage idéal de flic aux méthodes peu orthodoxes.

Un comportement volontairement énervant

Son attitude relativement désinvolte fait tourner la tête à tous ses adversaires, Alan Rickman en tête. Ce dernier campe ici un terroriste tour à tour inquiétant et redoutablement fourbe, passant de la courtoisie la plus charmante à la froideur la plus expéditive.

On n’a toujours pas parlé de l’histoire au passage : flic new yorkais fraichement débarqué à Los Angeles, Bruce Willis rejoint sa femme à une fête de fin d’année à son bureau (une tour moderne d’une quarantaine d’étages).

Surgit alors une bande de terroristes de l’ex-RDA (on est à la fin des années 80) dont les traits sont un peu caricaturaux (l’allemand qu’ils parlent entre eux est souvent intraduisible). Ces individus louches sont résolus à mener à bien une prise d’otages dans la fameuse tour. Mais toute cette belle mécanique va se gripper lorsque surgit le seul grain de sable possible : John Mc Clane.

Avec plus ou moins de finesse (la bombe balancée dans le puits d’ascenseur), il élimine un par un les gangsters et la plupart de leurs morts sont assez désopilantes à regarder. Il est à noter que la quasi-totalité des scènes d’action sont réalisées avec très peu d’effets numériques (il s’agit de vraies explosions et de vraies cascades).

Il mouille le marcel mais pas le reste

Petit truc à savoir : Bruce Willis se fera doubler dans toutes ses scènes d’action (même celle où il se retrouve dans la fontaine et où il ne se passe rien !) Je m’en excuse : ça va vous gâcher le mythe mais certainement pas le film ! Je ne vous spoile bien évidemment pas le final qui réserve quelques surprises. Et ce quand bien même on croit que tout va (enfin) se terminer.

Quatre suites suivront (deux réussies et deux autres moins). En général les spécialistes et les fans s’accordent à dire que 58 Minutes pour Vivre et Une Journée en Enfer sont les meilleures.

Mais rien ne sera plus vraiment comparable à Piège de Cristal, à tel point que le second de ces films se retrouvera à inclure une référence notable pour son intrigue. Je ne vous en dis pas plus si vous n’avez pas tout ou partie de ces films.

Yippee-ki-yay !

E D I T H D E N A N T E S

→ Lien Wikipédia sur le film
https://fr.wikipedia.org/wiki/Piège_de_cristal

George Michael “Faith” [1987]

Un classique à posséder dans sa discographie de toute urgence si vous ne l’avez pas encore ! Pourquoi ? Lisez la suite et on verra après.

Un bijou pop

Tout juste sorti de sa période Wham!, boys band avant l’heure où il chantait des tubes à la “Wake Me Up Before You Go Go“, “Careless Whisper” et “Last Christmas“, Georgio Kyriakos Panayiotou (plus connu sous le pseudonyme George Michael) sort en 1987 l’album Faith.

Malgré de remarquables productions qui viendront après, ce premier effort solo est probablement le meilleur disque de sa discographie. A classer parmi les incontournables des années 80, cet album est un joyau de musique pop au même titre qu’un Thriller de Michael Jackson, un Like A Virgin de Madonna ou encore Purple Rain de Prince.

Très varié et très bien réalisé (George Michael l’écrit presque seul, en joue une bonne partie et chante de façon remarquable), on est devant ce que la variété au sens noble du terme peut produite de mieux.

Joliment irrévérencieux

Cela débute par un titre pop/rock efficace s’ouvrant sur de l’orgue (le morceau titre), un autre sur fond de gospel inspiré (“Father Figure“) et le très osé et délicieusement irrévérencieux pour l’époque “I Want Your Sex“. Cette longue suite sensuelle aux nappes de synthés envoûtantes illustre au mieux la capacité de l’artiste de pouvoir pasteuriser la soul music sans pour autant la dénaturer. Du très grand George Michael.

On continue plus loin avec “One More Try“, splendide ballade intemporelle qui sied à merveille pour emballer tant ce titre à lui tout seul est idéal pour tout slow qui se mérite. Les autres titres de la face B du vinyle de l’époque sont tous très bons aussi. Mentions spéciales pour le sautillant “Monkey” et cette magnifique “Kissing A Fool“, ballade acoustique jazzy encore une fois servie par l’admirable voix du beau George.

Après le succès critique et public de Faith, George Michael continuera à sortir de très bons disques dans les années qui suivront. Mais ces dernières seront plus dures à vivre : la crise avec sa maison de disques, la mort d’un conjoint brésilien atteint du sida, le décès de sa mère… et le fameux le coming out qu’il avait dû faire suite à un attentat à la pudeur. Dans un “joli petit parc” pour reprendre son expression…

Les derniers moments paisibles

Quand on analyse sa vie avec du recul et encore plus attentivement depuis sa mort tragique en 2016 le jour de Noel (le comble pour l’interprète de “Last Christmas“), on observe alors avec amertume que la période de la fin des années 80 correspond aux derniers moments vraiment apaisés de sa vie avant que tous ces problèmes à rallonge ne viennent ternir le tableau.

Si vous appréciez à la fois l’homme et l’artiste, alors foncez les yeux fermés sur ce Faith qui restera un must dans votre collection de disques. Bien entendu ses musiques résonneront encore longtemps aux oreilles des mélomanes et des musiciens. Mais aussi de celles de tous les amoureux transis, des ménagères en mal de reconnaissance, des nostalgiques d’une époque révolue… et puis globalement de toutes autres personnes mélancoliques de tous âges et de toutes origines. C’est la force d’une grande musique.

Tracklist :
01 Faith (3:16)
02 Father Figure (5:36)
03 I Want Your Sex (Parts I & II) (9:24)
04 One More Try (5:50)
05 Hard Day (4:48)
06 Hand to Mouth (4:36)
07 Look At Your Hands (4:37)
08 Monkey (5:06)
09 Kissing a Fool (4:35)
10 Hard Day (Shep Pettibone remix) (6:29)
11 A Last Request (I Want Your Sex Part 3) (3:48)

→ Lien Wikipédia sur George Michael
https://fr.wikipedia.org/wiki/George_Michael

→ Un live notable : Concert Of Hope 1993
https://www.youtube.com/watch?v=KciYBWwSkGU

E D I T H D E N A N T E S

Quai d’Orsay [2010]

Une bande dessinée savoureuse à l’humour tordant, souvent sarcastique et toujours d’une infinie justesse. Parue en deux tomes en 2010 et 2011, cette œuvre de fiction n’en est pas vraiment une en fait. Petit coup de projecteur sur ses origines, ses personnages hauts en couleur et son intrigue.

Une expérience au ministère des Affaires étrangères

Pour les néophytes il faut tout d’abord savoir que le Quai d’Orsay désigne le siège du Ministère des Affaire étrangères français, situé à Paris le long du quai du même nom qui borde la Seine. L’un des deux auteurs de cette remarquable bande dessinée n’est d’autre qu’un ancien diplomate qui a œuvré au sein de ce prestigieux établissement : il s’agit d’Antonin Baudry qui sous le pseudonyme d’Abel Lanzac signe ce scénario qui se décline en deux volumes.

Le dessin est quant à lui assuré par Christophe Blain à qui on doit aussi les bandes dessinées Isaac le Pirate et Gus, séries toutes deux antérieures à Quai d’Orsay. Une adaptation cinématographie de cette bd a été faite par Bertrand Blier en 2012. Si le film est loin d’être mauvais, il faut tout de même reconnaître que le résultat final n’est pas aussi brillant que l’original papier.

Des personnages atypiques

Dans Quai d’Orsay nous suivons les mésaventures d’Arthur, jeune conseiller sans aucune expérience de la diplomatie ainsi que de la fonction publique d’Etat. Cela va évidemment lui jouer des tours. Mais il possède néanmoins un bon esprit de synthèse et arrive (non sans mal) à s’investir dans des tâches complexes et ce même lorsque tous les événements ont l’air de se liguer contre lui. On découvre alors non sans un certain plaisir jouissif les coulisses de cette vénérable institution.

Dès le début de l’histoire intervient le personnage un brin rocambolesque et terriblement grandiloquent d’Alexandre Taillard de Vorms, ministre à la taille aussi haute que son verbe et avatar flagrant de Dominique de Villepin. Ce dernier fut l’ancien ministre des Affaires étrangères de Jacques Chirac sous le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin entre 2002 et 2004.

Il existe grâce au coup de crayon de Blain une certaine ressemblance physique entre les deux personnages. Mais c’est surtout par sa prose, ses envolées, ses idées, ses sautes d’humeur et ses répliques aussi caustiques que cinglantes que la magie opère et que le réel et le fictif se croisent pour notre plus grand plaisir.

La guerre en Irak en toile de fond

Les auteurs ont situé l’action dans la période qui a précédé le début de la seconde guerre d’Irak de 2003. Ce pays est ici symbolisé par le Royaume du Lousdem, accusé par l’administration américaine en place de développer un programme d’armes de destruction massive. Tout l’enjeu pour la diplomatie française va être d’éviter une guerre qui sera selon le ministre “la mère de tous les conflits à venir“…

On y aperçoit d’ailleurs brièvement un autre avatar de diplomate. Il s’agit du secrétaire d’Etat américain à la Défense de cette époque (inspiré directement de Colin Powell) ainsi que l’ancien président américain George W. Bush et l’ancien président de la République Jacques Chirac (et avec lequel le ministre entretient une relation de forte connivence).

Héraclite, Mao et Hergé

Le personnage du ministre à lui seul est un peu l’étendard de l’œuvre, sa simple présence dans une pièce et ses (rares) silences étant toujours aussi éloquents que lorsqu’il se lance dans une de ses envolées lyriques dont il a le secret. Grand amateur de Lettres, il peut passer avec une facilité déconcertante d’Héraclite à Mao en passant par Hergé (la séquence où il évoque les aventures de Tintin à ses conseillers déprimés est tout simplement jubilatoire).

L’histoire suit d’abord Arthur, puis se concentre par moments uniquement sur le ministre. Surtout lorsque ce dernier se trouve dans des situations où le secret d’Etat prend le dessus. Le personnage d’Arthur et du ministre ne se croisent pas toujours, le ministère étant aussi le lieu de travail de toute une sorte de petite cour qui tourne autour d’eux. Et elle vaut le détour également. Coups bas, bons mots qui fusent, vannes sarcastiques rythment le quotidien souvent imprévu de ce vivier de matière grise qui a toujours un train de retard sur les raisonnements de leur bouillant chef.

Les langages

Le travail d’Arthur est simple mais délicat : la rédaction des “langages”. Soit toute la communication officielle du ministre. Il peut s’agit de discours officiels à l’étranger, de simples communiqués destinés à la presse lors d’une crise internationale ou autre événement de politique politicienne qui s’en approche.

Cela donne très souvent lieu à d’irrésistibles réunions informelles plus ou moins improvisées où les différents acteurs et actrices s’étripent cordialement sur une simple inversion de mots ou un vague synonyme “qui peuvent déclencher une crise internationale” selon Arthur.

Une énorme part du comique de situation découle de ces satanés langages. Ils provoquent à chaque fois l’impatience du ministre, lassé d’attendre que son discours soit prêt à temps mais aussi la relative inquiétude de son jeune conseiller qui doit s’y reprendre à de très nombreuses reprises pour que les versions finales soient millimétrées au poil pour son N+1.

Cela nous ressemble en fait

Bref on n’a pas le temps de s’ennuyer dans cette histoire où ces individus ne comptent plus leurs heures, où ils passent à côté de leur vie personnelle ou encore se retrouvent dans des situations qui n’ont rien à envier au monde du travail entre guillemets plus conventionnel.

A titre de comparaison cela me rappelle une expérience professionnelle que j’ai vécu personnellement pendant quelques années. Pas au service de la diplomatie de mon pays mais dans un cabinet de gestion immobilière. Le parallèle est même assez saisissant entre ces deux mondes : une activité permanente qui ne s’arrête jamais, une tension certaine, des bons mots entre équipes et collègues, des commentaires vachards et surtout… une tendance obsessionnelle à soigner en permanence les fameux langages avec la clientèle pour ne pas froisser cette dernière.

Un courrier, un mail, une conversation anodine… Tout devient un piège potentiel, un terrain miné, un conflit larvé qui n’attend souvent qu’une étincelle pour exploser. En fait Quai d’Orsay c’est un peu partout que cela existe. C’est un peu eux, et c’est un peu beaucoup nous.

→ Plus d’infos sur la série Quai d’Orsay
https://fr.wikipedia.org/wiki/Quai_d%27Orsay_(bande_dessinée)

→ Site officiel du Ministère des Affaires étrangères
https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/