Eloge du dedans

Analyse sur le rapport aux autres notamment par rapport au regard : ce que l’on voit de prime abord du “dehors” d’une personne transgenre et qui ne correspond pas toujours à son “dedans”.

Sous ce titre d’apparence un brin anodine se cache une réalité du quotidien que tout le monde connait : ce que vous êtes aux yeux des autres et ce que vous êtes par rapport à vous-même.

Loin de moi l’idée de modifier la perception sur les conventions ou de déblatérer sans fin sur les tenants et aboutissants d’une forme de vie jusqu’ici insoupçonnée à vos yeux. Dans ce billet d’humeur je vous narre juste la différence entre l’image qu’une personne peut projeter à son entourage (ici en l’occurrence un travesti épanoui) et le reflet que cette dernière se renvoie à elle-même lorsqu’elle se retrouve noyée dans le brouillard du doute.

Il s’agit de ce que l’on appelle parfois le mythe de “l’extraverti introverti”. Ou la dualité de deux situations contraires qui sont d’ordinaire assez éloignées et qui se retrouvent à devoir coexister ensemble pour le meilleur et (bien souvent) pour le pire.

Les grands personnages ont beau être très entourés ils peuvent se retrouver très seuls. Etre seul(e) avec soi-même et ses propres doutes et mystères comme tout un chacun bien entendu. Mais aussi et de façon très liée se mettre en marge de la socialité la plus évidente (aborder quelqu’un, aller faire ses courses, exercer un emploi, etc.). Qui n’a jamais connu cette situation, même passagère ?

Il faut relativiser en permanence

En plus de devoir s’assumer il faut surtout savoir relativiser en permanence pour ne pas involontairement faire fausse route dans le chemin qui mène au bonheur de l’épanouissement permanent. Etre ainsi c’est vivre un quotidien qui peut être défini comme normal pour soi mais terriblement “pas banal” pour les autres.

Dans cette même vie cela peut être perçu intérieurement comme un peu dingue pour soi mais en somme pas si extraordinaire pour les autres… Après tout les frontières d’identité de genre commencent à être un peu moins fermées. La transidentité par exemple : en tant que mœurs de la communauté LGBT (Lesbiennes, Gays, Bisexuel(le)s & Transgenres) est quelque chose qui devient désormais un phénomène plus visible et mieux accepté (ou presque) par le commun des mortels.

Pourquoi donc s’offusquer que lors de situations en apparence inabordables pour une personne qui change de codes de genres certaines réactions soient étonnamment positives ?

Dissocier le vrai du faux

Par étonnamment positif je vous parle là de cas très concrets vécus personnellement et qui n’engagent que moi dans ma spécificité propre (homme travesti occasionnel non opéré hétérosexuel). Cela va du coming out (parce que c’est bien le seul terme par défaut à employer) à la recherche d’emploi en passant par la quête amoureuse.

Aussi stupéfiant que cela paraisse au premier abord j’ai tenté les trois et les trois ont fonctionné sans que cela altère la situation. Je précise néanmoins que certains faits sont à relativiser : depuis le coming out je n’ai pas perdu de relations (ou alors je ne pense pas). Pour le travail ça a failli marcher (ce sera l’objet d’un autre article). Et pour les amours il est important de mentionner que je suis encore célibataire et sans enfant à l’heure où j’écris ces quelques lignes. Sachons distinguer tout de suite ce qui est de l’ordre du crédible véridique et avéré de ce qui relève de la mythomanie la plus abracadabrantesque.

Le fait de se travestir de façon assumée ne vous met pas au dessus du lot. Néanmoins et malgré ce fait d’être désormais mis(e) au même niveau que tout le monde, il est important de préciser que l’indécision et le doute s’immiscent fréquemment dans les pensées et cela peut en devenir toxique.

Un rapport de force clairement en défaveur

Ce sentiment d’impuissance face à soi-même est renforcé lorsque l’environnement extérieur lui donne involontairement raison. Qui n’a jamais éprouvé des envies de revanche, de haine voire de meurtre lorsque tous les éléments sont contre vous ? Lorsqu’une personne se fait tirer dessus il est logique qu’elle réplique si elle en a les moyens pour éviter sa propre annihilation.

Hors dans le cas d’une personne un brin originale comme votre narratrice, il est des situations où le rapport de force est clairement en sa défaveur. Et ce même quand la riposte à l’outrage parait efficace.

Lorsque qu’une personne transphobe s’attaque à une personne transgenre (ou une personne stupide qui s’attaque à un travesti), le rapport en question est forcément inégal car il s’agit là d’un acte bien trop facilité puisque le cadre juridique est souvent mal défini. Car la responsabilité qui en découle peut rester aisément impunie. Les travestis et les transgenres resteront toujours d’un point de vue statistique moins nombreux que le reste de la population d’une société donnée.

La probabilité de croiser la personne ou non

Prenons un exemple aussi évident qu’indispensable pour cerner le truc : sauf si vous habitez dans une zone de non-droit où l’on parque une moitié de l’humanité derrière des volets, vous allez alors croiser dans la rue des personnes du même genre que vous et des personnes du genre opposé (des hommes et des femmes quoi!).

Admettons qu’en moyenne vous croisez une personne de chaque genre tous les quinze mètres (ce qui est une bonne moyenne lorsque l’on habite en milieu urbain). Vous marchez pendant une bonne heure. La probabilité de croiser dans ces 3600 secondes ne serait-ce qu’une seule et unique personne travestie ou transgenre tient encore aujourd’hui plus de la légende populaire que de la réalité….

Si chaque imbécile croisait tous les quinze mètres une personne trop originale à son goût, il est très certain que le rapport de force serait complétement changé et éliminerait du coup bien des idées noires auxdites personnes originales. Cela permettrait ainsi de se retrouver moins seul(e) avec soi-même.

Mais ça ce sera certainement dans une autre vie. Cette fameuse autre vie du “dedans” qui aimerait bien pour sortir de son isolement que les conditions y soient plus propices. Conditions qui viennent du “dehors”.

E D I T H D E N A N T E S

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