“Joker” [2019]

Assurément un des films coup de poing de l’année. Dans tous les sens du terme.

Grand film

Le réalisateur américain de Joker n’est ni plus ni moins que Todd Phillips. Oui c’est bien le même qui jusqu’ici avait versé (avec réussite) dans la comédie (la trilogie Very Bad Trip) ou dans le thriller War Dogs qui malgré son histoire véridique comportait une bonne dose d’humour. Humour noir certes mais humour quand même.

Ici dans Joker on aura du mal à trouver le même type de traitement tant la forme et le fond sont résolument tragiques. Il règne en effet une tension palpable de bout en bout dans cette claque de deux heures d’une descente aux enfers individuelle, le tout sur fond de révolte latente d’une société entière qui n’attend qu’une étincelle pour s’embrasser.

Le rôle-titre étant directement tiré de l’univers des comics, il est donc normal de retrouver des éléments de l’univers Batman dans son intrigue principale. Mais tout du long on n’a que peu l’impression d’être dans un film adapté des aventures du Chevalier Noir. Certes Joker raconte la genèse d’un des antagonistes les plus mémorables du cinéma et de l’univers Batman. Mais cette histoire peut se regarder et surtout s’apprécier même si vous n’avez que peu de connaissances et/ou d’attirance pour cet univers de supers héros comme de leurs adversaires hauts en couleurs et forcément relativement charismatiques pour beaucoup d’entre-eux.

Grande interprétation

Et que dire de la performance qui fera date de Joachim Phoenix (La Nuit Nous Appartient, Two Lovers, Her, The Sisters Brothers…) décidément abonné aux grands rôles?

Succédant à une longue suite d’acteurs qui ont tous livrés des performances du personnage propres à leurs jeux personnels et aux scénarios de différents films respectifs, Phoenix livre ici une partition incroyable de sincérité et d’une bouleversante crédibilité. On a rarement interprété la tourmente, le mal-être et la folie de façon si criante et si mémorable.

Comme l’étaient à leur époque des films notables comme Orange Mécanique ou Taxi Driver, c’est à la fois un spectacle qui dérange tout autant qu’il fascine. Jamais dans la surenchère, le personnage va peu à peu se déshumaniser à force de se prendre d’innombrables coups de la vie et de perpétuellement se redécouvrir. A tel point que l’on ne sait jamais pendant très longtemps où est la limite finale qui le fera définitivement basculer vers le côté obscur.

Ce personnage décidément hors normes du pire ennemi de Batman n’en finit pas de dérouter tant son évolution d’humain à créature nous entraîne dans une vertigineuse descente jusqu’aux tréfonds d’une âme tourmentée qui n’arrive jamais à trouver un éventuel salut ou même une simple échappatoire.

Qui est le vrai méchant dans l’histoire ?

Sans trop vous gâcher le plaisir si vous ne l’avez pas vu, on peut néanmoins insister sur l’aspect incroyablement pesant de l’ambiance générale qui règne sur le dernier tiers du film. On y découvre la folie criminelle naissante du Joker bien évidemment et qui apparaît par touches de façon particulièrement crue. Dans des gestes mais aussi dans des raisonnements qui interpellent forcément le spectateur et la spectatrice. Et cela force à se poser quelques questions : quelle est la vraie nature du Bien et du Mal, de la Lumière et de l’Ombre, de la Raison et de la Folie.

Le discours du film tend alors à se révéler plus noir, rendant l’atmosphère encore plus sombre. On atteint alors une forme de paroxysme cérébral comme on en avait plus vu depuis longtemps au cinéma. A se demander qui est le vrai méchant dans cette histoire. La société ? Ou les monstres qu’elle engendre ?

En somme Joker est peut-être le film le plus fasciste depuis l’extraordinaire Fight Club de David Fincher en 1999. Depuis ce film il n’y avait pas vraiment eu d’autre œuvre plus marquante sur ce type de thématique d’individus dressés les uns contre les autres au sein d’une société en plein déliquescence.

Même d’autres grands réalisateurs comme Nolan n’y étaient pas complétement parvenus. Les deux derniers volets de sa trilogie Dark Knight (où était présent un Joker magistralement interprété par le regretté Heath Ledger) étaient pourtant fortement imprégnés par un aspect qui flirtait avec le malaise d’une société corrompue et un certaine sentiement d’insurrection générale. Là aussi menée par un petit nombre d’individus très déterminés face à une majorité d’autres complétement dépassée par les événements (The Dark Knight Rises).

Une chose est sûre : comme son personnage principal, vous sortirez forcément un peu sécoué(e) de de cette expérience pure de cinéma. Une œuvre de ce calibre ne peut se digérer aussi vite que fumer une simple cigarette. Un conseil : allez boire une bière après.

E D I T H D E N A N T E S

→ Lien Wikipédia sur le film
https://fr.wikipedia.org/wiki/Joker_(film,_2019)

→ Un autre sur l’univers Batman DC Comics (section des antagonistes dont le Joker)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Batman#Ennemis

La Joueuse de l’Evier “Street Fighter”

Nous sommes très heureux de vous présenter cette toute nouvelle production de la chaîne vidéo YouTube Edith de Nantes.

Cette création originale est une parodie de la célèbre émission de rétrogaming de la chaîne vidéo Le Joueur du Grenier. Ce concept s’est fait connaître lors de délirantes sessions filmées de jeux vidéos un peu anciens qui ont pour particularité d’être particulièrement coriaces dans leur jouabilité.

Nous avons donc imaginé un pendant drolatique à l’émission originale en faisant jouer la non moins humoristique Edith de Nantes reconvertie le temps d’un épisode en joueuse d’un mémorable jeu de baston des années 80/90 : Street Fighter. Bon c’est aussi un fantasme ultime pour elle : pouvoir latter son meilleur pire ennemi du quotidien.

E D I T H D E N A N T E S

→ Lien Wikipédia sur Street Fighter (le vrai jeu)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Street_Fighter_(jeu_vidéo)

→ Chaîne YouTube Joueur du Grenier
https://www.youtube.com/user/joueurdugrenier

Supertramp “Breakfast In America” [1979]

Quand Supertramp sort ce sixième album en 1979 il est alors à son apogée commerciale et critique.

Vendu à plus de trente millions d’exemplaires dans le monde l’année de sa sortie, cet album est en outre gorgé de quelques uns des plus grands standards du groupe. C’est ce que nous allons voir. Ou plutôt entendre.

Le Superclochard

Supertramp est un groupe de rock progressif britannique qui a connu la plus grande partie de son succès dans les années 70 et 80. Son nom de scène est un jeu de mot qui signifie Superclochard. Tout un programme. Ses productions sont marquées par des thèmes alliant humour taquin teinté parfois de mélancolie et invitant à la réflexion sur fond de mélodies évidentes (“School“, “Dreamer“, “Give A Little Bit“, “Downstream“, “It’s Raining Again“). Cela rappelle d’autres grands noms de la pop music…

Il a souvent été dit (dont par moi-même) que si les Beatles ne s’étaient pas séparés en 1970, il est fort probable que leur musique aurait été très proche du son de Supertramp. A l’inverse un titre comme “Dreamer” n’aurait pas du tout fait tâche dans la discographie de Queen par exemple.

Deux têtes pensantes

De sa création en 1969 à 1983, les deux têtes pensantes du groupe seront Rick Davies et Roger Hodgson. Un peu à la manière de John Lennon et Paul Mc Cartney, ces deux-là se répartiront l’écriture et la composition de l’essentiel du catalogue.

Toutes les musiques étant estampillées sous la marque du groupe, cela entraînera des querelles qui durent encore de nos jours depuis le départ d’Hodgson en 1983. Celui-ci mettra toujours un point d’honneur à ne reprendre que les titres de sa main dans les concerts de sa carrière solo. Le reste du groupe continuera en revanche à interpréter en live tous les titres du répertoire superclochardien, tubes de Hodgson en tête bien évidemment.

Truffé de mélodies évidentes

Et côté contenu cela donne quoi ? Explorant toujours ce savant mélange de musique à la fois dense et mélodique, Supertramp nous offre une collection de chansons qui ont marqué plusieurs générations de musiciens et de mélomanes.

Les entraînants “Breakfast In America” (compo d’Hodgson) et “Goodbye Stranger” (compo de Davies) en sont les meilleures illustrations. On y trouve aussi une ballade poignante (“Lord Is It Mine?“), un rock puissant de Davies (“Just Another Nervous Wreck“), un final grandiloquant qui clôt en beauté cet album majeur des années 70 (“Child Of Vision“) et surtout l’euphorique “Take The Long Way Home” (encore signé par le génial Hodgson).

Et puis enfin il y a ce titre qui mettra tout le monde d’accord : “The Logical Song“. A l’heure où Supertramp divisait les amateurs et les jamais-au-grand-jamais, cela plu alors à l’époque à toutes les audiences et notamment à la presse spécialisée qui adorait le côté rock progressif du groupe mais dévalorisait son aspect commercial. C’était courant à l’époque et c’est encore valable de nos jours. Lorsqu’un artiste se met à vendre beaucoup, il perd immédiatement en crédibilité et donc en succès critique.

Ce fameux album à la pochette si particulière de nos jours (on y voit les anciennes tours jumelles du World Trade Center de New York sous forme de boîtes en carton pour denrées alimentaires) est par ailleurs le disque de musique étrangère le plus vendu en France depuis sa sortie (environ 3.5 millions d’exemplaires sans compter les innombrables versions pirates et exemplaires dupliqués).

Pour finir je vous recommande chaudement l’album live de la tournée Breakfast… enregistré à Paris en 1980 et nommé sobrement Paris. Il s’agit d’un véritable best of live des années 70 du groupe et qui ne se concentre pas que sur l’album qui nous a intéressé ici le temps d’un article.

Maintenant vous pouvez y aller. Take The Long Way Home.

Tracklist :
01 Gone Hollywood (5:20)
02 The Logical Song (4:11)
03 Goodbye Stranger (5:50)
04 Breakfast in America (2:38)
05 Oh Darling (3:49)
06 Take the Long Way Home (5:08)
07 Lord Is It Mine (4:09)
08 Just Another Nervous Wreck (4:26)
09 Casual Conversations (2:58)
10 Child of Vision (7:25)

→ Lien Wikipédia sur Supertramp
https://fr.wikipedia.org/wiki/Supertramp

→ Site officiel du groupe
http://www.supertramp.com/

→ Site officiel de Roger Hodgson
http://www.rogerhodgson.com/index.html